Qui est Manu Dibango ?
Date de naissance : 12 décembre 1933 (Douala, Cameroun).
Date du décès : 24 mars 2020 (Melun, France) à 86 ans.
Activité principale : Saxophoniste, chanteur camerounais de world jazz.
Nom de naissance : Odilien Emmanuel N’Djoke Dibango.
Où est la tombe de Manu Dibango ?
La tombe est située dans la division 44
Biographie de Manu Dibango
Figure-clé de la World Music, Manu Dibango est non seulement un saxophoniste et musicien brillant, mais aussi un formidable trait d’union entre les différents courants musicaux du monde entier, des rythmes traditionnels africains au jazz noir américain, en passant par le rap ou le hip-hop. Citoyen du monde, Manu Dibango se sentait chez lui aussi bien en Afrique, qu’en France ou aux États-Unis. Sa longue et magnifique carrière est à l’image d’un artiste généreux, simple et passionné qui aura toujours cherché le mélange et l’harmonie des cultures avant le succès à tous prix.
Une jeunesse bercée par le jazz et la musique
Odilien Emmanuel N’Djoké Dibango, dit Manu Dibango, naît le 12 décembre 1933 à Douala, au Cameroun, dans une famille protestante et pluriethnique. Son père, fonctionnaire, appartient à l’ethnie Yabassi, et sa maman, couturière, à l’ethnie Douala. Très vite, le jeune Manu s’initie au chant, auprès de sa mère qui s’occupe du temple protestant que la famille fréquente. Une fois son certificat d’études en poche, obtenu à « l’école des blancs », l’adolescent est alors envoyé en France pour la poursuite de ses études.
Au printemps 1949, à 16 ans, Manu Dibango accoste alors dans le port de Marseille, depuis lequel il se rend à Saint-Calais, dans la Sarthe, pour rejoindre sa famille d’accueil. Le jeune homme poursuit ainsi ses études dans la culture française, d’abord à l’internat, puis au lycée de Chartres. C’est là qu’il découvre la musique, le jazz, mais aussi la mandoline et le piano. Il se constitue également un cercle d’amis africains, ce qui lui permet de garder un lien avec sa culture d’origine ; il forme avec Francis Bebey, notamment, un petit groupe de jazz, et commence à se produire le week-end dans les boîtes de nuits et bals de campagne de la région. La musique est, alors, un hobby pour lui, il n’a aucune intention d’en faire son métier. Lorsqu’en 1956, alors installé à Reims, il échoue au baccalauréat, son père lui coupe les vivres pour le punir.
Les années belgo-africaines, sur fond de décolonisation
Le jeune Manu décide alors de tenter sa chance en Belgique ; il se produit dans des orchestres, cabarets et clubs privés de Bruxelles, Anvers ou Charleroi. C’est là qu’il y fait la connaissance de Marie-Josée, dite Coco, une artiste peintre et mannequin qu’il épousera en 1957. En 1960, alors que la Belgique négocie l’indépendance du Congo belge, Manu Dibango travaille dans une boîte de nuit bruxelloise particulièrement fréquentée par les politiques et intellectuels de l’époque. C’est dans cette atmosphère, qui le ramène à ses origines africaines, que le jeune artiste découvre la musique congolaise. Sa rencontre avec Joseph Kabasélé, qui l’embauche comme saxophoniste dans son orchestre, lui ouvre les portes de l’African Jazz. Ensemble, ils enregistrent plusieurs disques, dont Independance Chacha (1960), qui rencontrent un fort succès sur le continent africain et se poursuivent par une tournée au Zaïre en août 1961.
Installé à Kinshasa (ex-Léopoldville), le couple Dibango prend avec succès la gérance d’une boîte de nuit, l’Afro-Negro. Sur les conseils de son père, Manu poursuit son aventure africaine et ouvre en 1963 son propre établissement dans sa ville natale de Douala (Cameroun), le Tam-Tam. Mais, confronté à de nombreuses difficultés politiques et financières, liées à une situation de guerre civile et à l’accumulation de dettes, le couple décide en 1965 de clore le chapitre africain, pour rentrer à Paris.
Un nouveau départ en France, avant la consécration américaine
Après un passage à vide de quelques mois, Manu Dibango est embauché comme organiste dans l’orchestre de Dick Rivers, puis celui de Nino Ferrer, deux grands noms de la musique de l’époque. Quand Nino Ferrer se rend compte que Dibango est un saxophoniste brillant, il lui fait alors jouer de son instrument de prédilection, puis lui donne la direction de l’orchestre. Les tournées se succèdent dans toute l’Europe et Manu Dibango renoue alors avec le succès.
En 1969, le musicien sort son premier album solo, Saxy Party, fait de reprises et de compositions originales jazzy, aux accents africains. L’accueil du public, encourageant, le fait enregistrer dans la foulée un second album qui rend hommage à ses racines camerounaises.
À l’occasion de la Coupe d’Afrique des Nations célébrée à Yaoundé en 1972, Manu Dibango compose un 45 tours, dont la face B, Soul Makossa, attire l’attention de producteurs américains. Si la France et le Cameroun boudent dans un premier temps le morceau, celui-ci rencontre un franc succès aux États-Unis ; un engouement qui marque les débuts fulgurants de la carrière américaine du saxophoniste. Les albums et les concerts au pays de l’Oncle Sam s’enchaînent alors à un rythme soutenu.
Un musicien au sommet de son art, entre l’Afrique et la France
Désormais vedette internationale, Manu Dibango vit entre Paris, New York, ou Yaoundé. En 1975, il entreprend une nouvelle aventure africaine, en acceptant la direction du Nouvel Orchestre de la Radio-Télévision Ivoirienne, à Abidjan (Côte d’Ivoire), qu’il occupera 4 années. En parallèle, il continue d’enregistrer de nombreux albums, parmi lesquels Home Made (1978), avec des artistes ghanéens et nigérians, Gone Clear (1979), Waka Juju, (1982), Adele Dance (1984), Electric Africa (1985), ou encore Polysonic (1990). Son style, qui mêle influences rap/hip-hop et rythmes traditionnels africains, propulse l’artiste au sommet de la musique africaine moderne. Enchaînant les concerts, les festivals et les apparitions télé, il présente aussi brièvement l’émission télévisée Salut Manu, qui consiste à lancer de nouveaux talents dans le milieu.
Pour ses soixante ans, Manu se lance dans un grand projet visant à revisiter le patrimoine musical de l’Afrique, en réunissant, dans son album Wakafrica ou l’Afrique en route (1992), les grands noms de la chanson africaine et internationale : Youssou N’Dour, Salif Keita, Angélique Kidjo, Papa Wemba, ou encore Peter Gabriel et Manu Katché comptent parmi les invités de marque de l’opus. En 1998, Dibango est aussi à l’origine du Festival Soirs au Village, consacré aux musiques africaines, qui a lieu chaque année dans sa ville d’accueil, Saint-Calais.
Les dernières années d’un artiste hors pair
Infatigable, malgré l’âge avançant, Dibango multiplie les projets, avec de nouveaux albums, comme Mboa’su (2000), Kamer Feeling (2001), Manu Dibango joue Sydney Bechet (2007), Past Present Future (2011), et de nombreuses apparitions publiques, dont un concert à l’Olympia (2001), une représentation à Douala, sa ville natale (2003) – où il ne s’était pas produit depuis 27 ans -, une nomination comme Artiste de l’Unesco pour la Paix (2004), ou encore la formation d’un nouvel orchestre, le Maraboutik Big Band.
Passionné par tous les genres musicaux, doué d’une grande adaptabilité aux nouvelles tendances de son temps, Manu Dibango n’a de cesse d’ajouter de nouvelles cordes à son arc, en signant à plusieurs reprises des compositions pour le cinéma (Kirikou et les bêtes sauvages), mais aussi des ouvrages autobiographiques, comme Balade en saxo : dans les coulisses de ma vie, accompagné d’un album.
À 80 ans passés, l’inlassable Dibango continue ses apparitions publiques, à l’occasion de représentations ou d’événements sportifs : ses pas le mènent ainsi de New York, à la Côte d’Ivoire, en passant par l’Allemagne, le Canada, le Brésil, l’Afrique du Sud, ou l’Autriche.
Le 24 mars 2020, Manu Dibango est fauché dans sa 87ème année par la pandémie de coronavirus. Confinement oblige, ses obsèques sont célébrées au Père-Lachaise dans la plus stricte intimité familiale.