Catégories
Tombe

CERNUSCHI Henri

Qui est Henri Cernuschi ?

Date de naissance : 19 février 1821 (Milan, Italie).
Date du décès : 11 mai 1896 (Menton, France) à 75 ans.
Activité principale : Banquier, économiste, journaliste, collectionneur d’art.
Nom de naissance : Enrico Augusto Primo Giuseppe Antonio Luigi Mansueto Carlo Mario Cernuschi.

Où est la tombe d’Henri Cernuschi ?

Tombe Henri CERNUSCHI

La tombe est située dans la division 66

Père-Lachaise PLAN des divisions

Le monument funéraire d’Henri Cernuschi au Père-Lachaise

La tombe est une stèle ciselée, ornée d’un élégant bas-relief, témoin discret de son passé et de sa stature intellectuelle.

Père-Lachaise - Division 66 - Henri Cernuschi 02

Sa présence dans la division 66, un secteur dédié aux personnalités politiques et intellectuelles, confère à son tombeau une place symbolique, à proximité d’autres figures publiques.

Biographie d’Henri Cernuschi

Henri Cernuschi photo

Henri Cernuschi (1821–1896) fut un véritable « homme de la Renaissance » du XIXᵉ siècle : patriote, banquier visionnaire, économiste engagé, collectionneur passionné et mécène discrètement influent.

Origines et jeunesse (1821‑1847)

Enrico Cernuschi, connu plus tard sous le nom francisé Henri, voit le jour le 19 février 1821 à Milan, alors partie du royaume lombard-vénitien sous domination autrichienne. Il est l’aîné d’une fratrie de quatre : deux frères — Attilio et Costantino — et une sœur, Erminia.

Orphelin à 13 ans de son père, Claudio, puis de sa mère Giuseppina à 18 ans, il devient le chef d’une famille en proie à la précocité des deuils.

Après des études classiques à Monza chez les Barnabites, il poursuit des études supérieures à l’Université de Pavie, où il obtient en 1842 son diplôme en droit, puis en 1846 un brevet pour exercer comme avocat. Il fréquente alors les salons cultivés de Milan, s’y forme aux idées politiques, et commence à éprouver une conscience civique aiguë et un esprit libertaire.

L’engagement révolutionnaire (1848‑1850)

En 1848, l’agitation politique gagne l’Italie avec le « Printemps des Peuples ». Cernuschi participe activement aux Cinq Journées de Milan, contribuera à chasser les Autrichiens et gagne rapidement en influence en tant que leader républicain.

En 1849, il rejoint Rome en qualité de député de la République romaine, alors en pleine phase constitutionnelle. Mais la chute de la république, écrasée par les troupes françaises, le conduit à l’emprisonnement ; détenu entre juillet 1849 et septembre 1850, il parvient finalement à s’évader pour gagner la France, exilé et contraint de fuir son pays natal.

Débuts à Paris : commerce, finance et idées républicaines (1850‑1869)

Arrivé à Paris en 1850, Cernuschi découvre tôt les difficultés inhérentes à l’exil : il donne des cours d’italien, travaille comme copiste et suit des études d’économie, finance et banque. En 1852, grâce à son talent et à l’appui du banquier Morpurgo, il entre au Crédit Mobilier, prestigieuse banque d’affaires, où il gravit rapidement les échelons jusqu’à devenir administrateur.

Petit à petit, il forge une réputation d’expert en économie, en particulier grâce à son ouvrage La Mécanique de l’échange (publié en 1865)  . Il publiera également sur le coopérativisme (Illusion des sociétés coopératives, 1886) et surtout sur le bimétallisme, concept qu’il défend ardemment et qui introduit le terme « bimétallisme » dans la langue économique.

En parallèle, Cernuschi s’engage politiquement en France. Opposant au Second Empire, il devient propriétaire d’une partie du journal Le Siècle dès 1870, rejoignant Gustave Chaudey et Théodore Duret dans la sphère des républicains modérés. Son soutien financier au comité anti-impérial en avril 1870 lui vaut un nouvel exil en Suisse, mais il revient à Paris dès la chute de l’Empire en septembre, accueillant avec enthousiasme la proclamation de la IIIᵉ République, lors d’une cérémonie à l’Hôtel de Ville.

Nationalité, guerre et idéal fédéraliste (1870‑1871)

Pendant le siège de Paris (1870‑1871), Cernuschi intègre la Commission des subsistances, œuvrant pour approvisionner la ville. Le 29 janvier 1871, Emmanuel Arago lui remet le décret de naturalisation française, actant officiellement son ralliement patriotique en cette période mouvementée.

Lors de la Commune de Paris, il tente de jouer un rôle de pacificateur, sollicitant une réconciliation entre Communards et Versaillais sur la base de son idéologie fédéraliste. Son journal Le Siècle poursuit sa publication, malgré l’arrestation et l’exécution, le 24 mai 1871, de Gustave Chaudey, qu’il défendit jusque dans les prisons de Sainte-Pélagie  . Après cette épreuve, Cernuschi quitte la direction opérationnelle du journal, mais demeure l’un de ses principaux actionnaires.

Voyage autour du monde et émergence du collectionneur (1871‑1873)

En septembre 1871, marqué par la violence de la Commune, il entreprend un grand tour du monde en compagnie de Théodore Duret. Leur voyage, qui les conduit de New York au Japon, à la Chine, à la Mongolie, à l’Indonésie (Java), au Sri Lanka et à l’Inde, dure jusqu’à fin 1872.

À Tokyo, Canton et ailleurs, Cernuschi acquiert près de 5 000 œuvres, principalement des bronzes japonais et chinois, mais aussi des céramiques, calligraphies, paravents et statues bouddhiques, alors encore peu connus en Europe. À son retour, ces pièces sont exposées au Palais de l’Industrie (1873‑1874), suscitant fascinant intérêt et curiosité pour l’Asie.

Le mécène discret et les bals sous le Bouddha (1873‑1896)

De retour en France, Henri se retire partiellement de la vie politique pour se consacrer à l’économie monétaire, multipliant les publications sur le bimétallisme (Or et Argent, Silver Vindicated, Le Grand Procès de l’Union latine…), tout en accumulant les distinctions. Il est désormais reconnu comme l’un des premiers économistes de son temps.

Mais sa passion principale reste l’art et les cultures asiatiques. Il aménage son hôtel particulier, au 7 avenue Vélasquez, près du Parc Monceau, en un écrin sophistiqué pour ses collections. La salle principale, dominée par la statue monumentale du Bouddha de Meguro (plus de 4 mètres de haut), offre un véritable temple personnel.

Il invite artistes et intellectuels à des fêtes élégantes parmi les objets d’art, organisant notamment les premiers bals éclairés à l’électricité, au pied de la statue du Bouddha—un rituel mondain qui Souligne son rôle de pionnier dans l’usage de la lumière électrique.

Mort et legs (1896)

Le 11 mai 1896, Henri Cernuschi s’éteint à Menton, dans la maison de son frère Costantino, à l’âge de 75 ans  . Il repose au cimetière du Père-Lachaise (division 66).

Il lègue la totalité de sa collection d’art asiatique et son hôtel particulier à la ville de Paris. En 1898, cet ensemble devient le musée Cernuschi, l’un des plus anciens musées dédiés aux arts de l’Extrême-Orient en France.

Œuvre écrite et influence économique

Au-delà de sa vie, Cernuschi demeure une figure influente dans le monde de la finance :

  • Mécanique de l’échange (1861 ou 1865 selon les sources) ;
  • Silver Vindicated (1876), plaidoyer en faveur du bimétallisme ;
  • Autres titres majeurs : Or et Argent, Le Bimétallisme en Angleterre, Le Grand Procès de l’Union latine

Il est également considéré comme un précurseur dans la lutte contre le socialisme, et contribue à la fondation de la Banque de Paris, préfiguration de BNP Paribas.

Personnalité, passions et bilan

Cernuschi fut à la fois :

  • Un patriote italien déterminé, véritable artisan des premières républiques révolutionnaires napolitaines et romaines ;
  • Un spirituel repenti, ayant trouvé une nouvelle patrie en France, pays qu’il encouragea à embrasser les idéaux républicains ;
  • Un économiste passionné, paramètre dans les débats internationaux autour de la monnaie et du rôle de l’or et de l’argent ;
  • Un collectionneur humaniste, ouvrant en Occident les routes de l’art asiatique, et un mécène discret, qui offrit au public à la Ville de Paris un legs durable.

  • Ses Succès :
    • Participation active aux mouvements patriotiques italiens.
    • Richesse personnelle (2 millions de francs or vers 1870).
    • Œuvres économiques influentes et présence dans les cercles bancaires.
    • Fondation d’un musée encore prestigieux.
  • Ses Défaites :
    • Échecs politiques : disparition des républiques (Milan, Rome).
    • Exils forcés en 1850 et en 1870.
    • Effets collatéraux de la Commune (mort de Chaudey).
    • Mort précédant l’achèvement complet de son musée (ouvert en 1898).